Jus de soja: les levains du yaourt se réinventent!

Du lait de vache au jus de soja, les levains du yaourt se réinventent!

Les « yaourts » végétaux sont des alliés de la transition alimentaire car ils représentent une réelle opportunité de réduire la quantité de protéines animales dans notre diète, au profit de protéines végétales. Si la sélection des levains pour la production de yaourts laitiers bénéficie de nombreuses années de recherches , celle pour faire des « yaourts végétaux » en est à ses balbutiements. Pourtant, dans ce contexte de végétalisation de l’alimentation, les défis à relever sont de taille : du choix des levains dépend la qualité de ces yaourts végétaux (masquage des off-notes, dégradation des composés sources d’inconfort digestif par exemple).

Les yaourts végétaux sont peu appréciés des consommateurs occidentaux, pour deux raisons principales : leurs qualités organoleptiques sont jugées médiocres comparées à celles de leurs équivalents laitiers, ils peuvent contenir des composés source d’inconfort intestinal. La fermentation, par un choix éclairé des levains, peut permettre de limiter ces problèmes. Dans ce travail, nous avons étudié deux bactéries lactiques : Lactobacillus delbrueckii subsp. delbrueckii CIRM-BIA865, et Lactiplantibacillus plantarum CIRM-BIA777 pour décrypter leur métabolisme pendant la fermentation du jus de soja.  Nous avons mis en œuvre des analyses génomiques, transriptomiques et métabolomiques pour identifier  les bases génétiques  permettant croissance et métabolisme en jus de soja. Nous avons ainsi montré que :

  • CIRM-BIA865 possède les gènes de transport et de dégradation du sucrose, sucre majoritaire du jus de soja, mais pas ceux permettant la dégradation du stachyose et raffinose, oligossacharides souvent associés à l’inconfort digestif.
  • Lors de la fermentation, CIRM-BIA865 présente un comportement atypique. Alors qu’elle acidifie le milieu de manière attendue, traduisant un métabolisme actif, ses cellules s’allongent, allant jusqu’à atteindre une taille 20 fois supérieure à celle observée en milieu de culture de laboratoire.
  • En parallèle, l’expression de nombreux gènes de stress se trouve induite, suggérant que le jus de soja constitue un environnement défavorable à la croissance de cette bactérie.
  • CIRM-BIA777 possède tous les gènes codant pour les enzymes nécessaires à la dégradation du sucrose, stachyose et raffinose (alpha‐galactosidase).
  • Pourtant lors de la fermentation, seul le sucrose est consommé, sans que les facteurs empêchant la dégradation des deux autres sucres aient été identifiés.
  • La fermentation par CIRM-BIA777 permet d’augmenter les niveaux de certains composés aromatiques, par exemple le phényléthanol et le 2,3-butanedione, associés respectivement à des notes florales et beurrées, tout en diminuant les niveaux de certains composés volatils associés à des arômes indésirables verts et de haricot, comme l'hexanal.
Quatre photos présentant des bactéries observées au microscope
Observation de la bactérie Lactobacillus delbrueckii supsp. delbrueckii CIRM-BIA865 au cours de la fermentation de jus de soja ou du milieu MRS, après 4 et 24 h de croissance. © SM Deutsch - INRAE

Perspectives : Ces résultats mettent en évidence qu’une meilleure connaissance du métabolisme des bactéries lactiques en fermentation de jus végétaux est nécessaire pour comprendre les facteurs de stress pouvant affecter les bactéries pendant la fermentation, et pour identifier les conditions de fermentation qui seraient favorables à la dégradation des composés tels que stachyose et raffinose.

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Publications scientifiques

Contact

stephanie.deutsch@inrae.fr

Soutien Financier 

Ce travail a été soutenu financièrement par l’ Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement” INRAE (France), l’Agence Nationale de Recherche Technologique ANRT (France), et la compagnie Olga-Triballat .